Veillée d’Auvergne et du Massif Central ; « A la recherche de Céleste Albaret »… et Marcel Proust : une amitié solide aussi improbable qu’unique dans la littérature.
Improbable en effet, cette amitié entre un génie de la littérature, Marcel PROUST et sa gouvernante lozérienne, Céleste ALBARET et, en même temps, unique dans la littérature, c’est ainsi que l’on peut qualifier la relation extraordinaire qui unissait ces deux êtres que tout opposait et qui ont été « amis de toujours ».
Grâce au talent de Laure HILLERIN, excellente conférencière, les amis de la Veillée d’Auvergne, filiale culturelle de la Ligue Auvergnate, réunis autour de leur pdt, Jean-François SERRE, vendredi 10 mars 2023, à 19h, dans l’accueillant restaurant : « Le 12-15 », ont pu s’immerger avec délice dans l’univers proustien.
Jean-François SERRE, dans son introduction, remercia vivement l’assistance de sa présence lors de cette Veillée littéraire revenant aux sources de l’association et salua en particulier, avec courtoisie, la conférencière.
Avec humour, il mit enfin, l’assemblée dans l’ambiance proustienne, en citant un extrait « Du côté de chez Swann » dans lequel Madame VERDURIN n’est pas très « tendre » avec l’Auvergne….
Josyane DELMAS-BOUCHARD, secrétaire de la Veillée d’Auvergne, présenta, quant à elle, Laure HILLERIN, écrivaine brillante, spécialiste des biographies féminines, lauréate du prix Céleste ALBARET en 2015, chevalier des Arts et Lettres, ayant fait partie, en 2022, de la sélection du Goncourt de la biographie pour : « A la recherche de Céleste ALBARET, l’enquête inédite sur la captive de Marcel PROUST », ouvrage paru aux éditions Flammarion, en 2021 et thème de sa conférence, dans le cadre de la célébration du centenaire de la mort de Marcel PROUST en novembre 1922 et à la suite des commémorations organisées en Lozère, en août 2022.
Eloquente, à l’aide d’un diaporama et des enregistrements émouvants de la voix de Céleste ALBARET, Laure HILLERIN dévoila son enquête inédite, rigoureuse en s’appuyant sur des archives originales et sur la correspondance de PROUST.
L’histoire singulière de Céleste ALBARET fut ainsi contée avec passion et conviction. Entrée au service de Monsieur PROUST en 1913, elle resta auprès de lui fidèlement jusqu’à son décès en 1922 et ces années firent basculer la vie de Céleste, paysanne lozérienne, née à Auxillac en 1891.
Après son mariage avec Odilon ALBARET, elle devint la servante de Marcel PROUST qui la jugea d’emblée, « forte de caractère et de dignité ». Auprès de l’écrivain, bien que timide et peu instruite, Céleste, intelligente, se construisit peu à peu jusqu’à devenir sa confidente et son « amie «, copiant sous sa dictée, créant les fameuses « paperolles », répondant à sa place au téléphone et côtoyant, le monde des Lettres et des Arts.
Même si leur relation ne fut pas toujours idyllique, Céleste qui consentait que Marcel PROUST pouvait être un tyran, voua à son « patron et ami », un véritable culte tandis que lui faisait preuve à son égard, d’une grande sollicitude.
Après la mort de l’écrivain, Céleste reprit une vie ordinaire mais, malheureuse, elle se sentit décalée, dans un monde qui n’était plus le sien.
Gérante d’un hôtel avec son mari, devenue maman d’Odile qui reconnut : « je suis née de la mort de PROUST », c’est lorsqu’elle devint la gardienne de la maison de Maurice RAVEL à Montfort-L’amaury que Céleste s’éveilla peu à peu au souvenir du grand homme de Lettres, Elle reprit contact avec la famille et les amis de l’écrivain, contribuant par ses interviews à une notoriété croissante de Marcel PROUST dans les années 60-70, médiatisant son œuvre.
Il y eut bien des controverses à son sujet mais chacun s’accorde à dire désormais que le rôle de Céleste ALBARET auprès de Marcel PROUST fut déterminant.
Avant sa mort en 1984, à 93 ans, à Méré, celle qui vécut dans « le cercle enchanté » de l’éminent auteur littéraire, qu’elle qualifia de « Quel homme, si noble de sentiments ! », avoua : « je l’aimais comme j’aimais ma mère, mon enfant ».
Des applaudissements enthousiastes saluèrent la conférence remarquable de Laure HILLERIN qui répondit avec entrain à quelques questions, révélant que Céleste a laissé des traces dans l’œuvre de PROUST en lui inspirant notamment le personnage de Françoise ou celui d’Albertine.
Après que Laure HILLERIN ait pu échanger avec ses admirateurs en dédicaçant son ouvrage, une collation réconfortante acheva cette Veillée d’Auvergne, devenue l’espace d’un soir, un salon littéraire distingué, donnant envie à chacun de relire PROUST.